Je rentre dans la chambre de Dany et je contemple la vue. La France, c'est plus beau que je ne me l'imaginais et je pouvais comprendre pourquoi ma petite amie avait décidé d'y faire ses études. La blonde -probablement sa colocataire- qui m'a laissé entrer se retire rapidement, me laissant seule avec une Dany complètement endormie. J'ignore encore ce que je fais à des milliers de kilomètres de ma maison, mais il fallait impérativement que je la vois. Mon sac tombe sans trop de bruits par terre alors que je me faufile dans le lit de ma petite amie. Elle me manque comme jamais je n'aurais pensé. Quand je croise une brune à Fairview, j'espère toujours que ce soit elle et lorsque je ferme les yeux avant de me coucher le soir, je peux presque sentir son parfum envoûtant et ses bras autour de ma taille. Je suis crevée et pourtant fébrile de rester avec la demoiselle pendant une fin de semaine complète. Elle pourra me montrer ce qu'elle fait, son nouvel environnement et cette vie dans laquelle j'ai l'impression d'avoir moins d'importance. Nous ne sommes pas comme les autres couples, le notre dure depuis bien trop longtemps pour qu'on songe à tout arrêter pour des broutilles. Je m'allonge à ses côtés et comme prévus, je ne la réveille pas vraiment. Mes bras trouvent le chemin de sa peau alors que je me colle contre son corps, finalement paisible. Ça a été une longue nuit d'avion et en ce matin rayonnant, il n'y a aucun endroit sur cette terre qui me semble plus paradisiaque. Je reste couchée contre elle, le temps que la demoiselle se réveille. Sa chaleur traverse mes vêtements, communique avec mon corps. Cette proximité m'a manqué plus que je ne pouvais me l'imaginer et ça fait tellement de bien que ça en fait mal. « Sarah ? » J'ouvre légèrement les yeux réalisant que je m'étais moi aussi assoupie aux côtés de la brunette. Je souris légèrement, encore dans les vapes et à moitié endormie. Les lèvres de Dany s'emparèrent des miennes et je la laisse faire, heureuse d'être finalement en sa présence. « Tu me manquais trop. » plus qu'elle ne pouvait l'imaginer. Skype, c'est pas suffisant et je dois marquer mon territoire dans un certain sens. La mère de ma petite amie n'arrêtant pas de me parler de cette colocataire blonde qui était bien proche de Danielle. Je sais pertinemment que madame Clever ne cherche pas d'embrouilles, qu'elle ne nous souhaite que du bien, mais la vérité est que j'ai peur de la perdre. « Fairview sans toi, c'est pénible. » que je chigne légèrement contre elle. Je comprend parfaitement ses motifs, mais voilà : sans elle à Fairview, rien ne vaut vraiment la peine, car elle est rapidement devenue mon univers en quatre ans. Dany se détache légèrement de mon corps afin de fixer mes prunelles. J'ai peur, j'ai des incertitudes, mais je l'aime. Je l'aime à en crever, même. « Je sais, mais c'est pas définitif. Tu vas devoir me supporter à temps plein bientôt. » Elle essaie de se montrer réconfortante et j'y crois. Je m'y agrippe de toutes mes forces, parce que moi sans elle, c'est impensable. C'est impossible, ce n'est pas quelque chose dont je me souviens. Elle colle son front au mien, assurant un contact visuel, tactile et vrai. « nous séparer ? Ils ont jamais été cap d'y arriver. » Je souris à la référence de mon film culte, fond devant le regard mignon de ma petite amie. Je scelle nos lèvres une autre fois avec aucune intention de la lâcher. J'essaie de me persuader qu'elle a raison, nous allons réussir là où beaucoup ont échoués, parce que Danielle est ma raison de vivre, c'est l'amour de ma vie.

J'y ai cru. J'y ai cru de toutes mes forces, avec toute mon âme et chaque parcelle de mon corps. Le chauffeur de taxi me regarde quelques fois, tout de même soucieux de mon humeur plus que massacrante. Je suis bête, je suis agressive, mais en fait j'ai surtout le coeur brisé. Ça me fait mal dans chaque muscle, ça me détruit de l'intérieur. L'homme arrête devant la demeure familiale et je reprend rapidement tout mes bagages sans oublier de le payer. Il se casse aussi vite qu'on est arrivé et sans vraiment porter attention à l'environnement, je rentre dans la maison de mon enfance sans même cogner. Je laisse mes affaires dans l'entrée et me dirige vers la cuisine où j'entends le bavardage de maman, Alexys, Bonnie et Milan. Ils se taisent dès qu'ils me voient apparaître dans le cadre de la porte. « Sarah ! » « c'était comment la France ? » « Dany va bien ? » Trop de questions auxquelles je n'ai pas envie de répondre, je reste fixe. Ma mère s'inquiète légèrement, Lexy arrête de jacasser sur le bonheur de manger des macarons et Milan se relève tranquillement. Si j'ouvre la bouche, je vais craquer. J'étouffe, je manque d'air. Je fais un signe de la main et sans demander mon reste, je grimpe les marches qui indiquent le chemin vers ma chambre de gosse. Dès que ma chambre est atteinte, je réalise à quel point c'était une mauvaise idée. Les photos de Danielle et moi sont placées partout dans cette pièce et finalement, je craque. Mes genoux flanchent et je me retrouve par terre, vidant mon corps de larmes salées. Quelqu'un me touche l'épaule et me prend rapidement dans ses bras. C'est Milan, mon frère, mon protecteur. Je ne contrôle plus rien, mon corps ne m'appartient plus. Il me serre à me briser les os, mais ça m'aide. Tout dans cette chambre me rappelle la grossière erreur que je viens de commettre. J'avais tord sur toute la ligne, Dany et moi, on étaient pas faites pour rester ensemble. L'éternité rimait avec son prénom, cette chambre rassemble tellement de souvenirs qui me brûlent la cervelle. Ces quatres murs avaient entendus nos confessions, étaient témoins de notre première fois, savait qu'à chaque fois que la brune s'endormait dans mes bras, je l'observais comme si je ne pouvais vivre sans elle. J'aimerais ne rien ressentir, ne pas pleurer au moment où je comprends que tout est terminé, être forte. J'ai l'impression d'asphyxier, de me noyer et ne pas être capable de remonter. « C'est terminé. Je - Je ne suis plus avec Dany. » et voilà. C'est dit, avoué. Mon frère me lance un regard troublé et pourtant je n'arrive pas à placer un mot de plus. Ça me fait tellement mal de l'aimer encore autant. Elle et moi, c'était pour la vie, on se l'était promis. Milan m'aide à me relever simplement pour que je puisse m'étendre sur le lit. Je ne devrais pas perdre mon sang froid, ainsi. Les larmes coulent sans que je ne m'en aperçoive et je remarque du coin de l'oeil que ma soeur et ma mère sont désormais présentes dans la pièce. La dernière me prend dans ses bras, alors que la première s'assois à mes côtés et caresse mes cheveux. J'aime ma famille plus que tout au monde. Pourtant ils ne comprennent pas. J'ai perdu mon âme soeur et sans elle, je pense avoir perdu tout point de repère.

trois cent soixante cinq jours et aucun contact. À mon grand étonnement, la vie n'a pas arrêtée après ma rupture. Le lendemain le monde existait toujours malgré le fait que tout soit ruines au fond de mon coeur. Ne pas être avec Danielle, ne pas la tenir dans mes bras, l'embrasser, la réconforter, tout ça, ça me manque terriblement. Tout nos souvenirs sont précieusement rangés dans cette petite boîte en carton écrit "sarielle" dessus, parce que je ne peux supporter de les voir quotidiennement. Parfois, je me surprends à l'imaginer en France, comme je l'ai vu. Avec cette colocataire un peu trop collante, ses amis français qui ne comprennent pas la langue que je parle et surtout elle. Elle me manque à chaque jour et chaque nuit. Je mets mon énergie dans la danse, la fête et quelques histoires sans lendemain. Tout ça ne suffit pas, il s'agit de distractions. Je redoute le moment où il faudra que j'affronte mon passé. La famille était venue voir un de mes spectacles de danse, cette troupe compétitive qui mettait mes connaissances à rude épreuve. Je m'étais blessée. Un instant j'étais distraite et l'autre je me tordais de douleur sur la scène. « C'est grave, docteur ? » que je demande, taquine. Il s'agit de ma soeur aînée, Angie. Je crains le pire, mais ne pas céder à la panique restait le meilleur moyen de gérer mes émotions. Elle soupire, examinant ma cheville. « arrête tes conneries, c'est sérieux. » et ça me fout la trouille. Tout ce à quoi je pense, c'est à la main de ma jumelle qui serre la mienne, alors que -même si j'adore ma soeur- j'aurais tout donné pour que ce soit Dany. Elle saurait me calmer, trouver un moyen de me rassurer. Elle l'a toujours fait. J'inspire profondément, la douleur restant bien intense au niveau de la jambe, la peur me tenaillait le ventre sans relâche depuis quelques heures. « Je vais pouvoir continuer à danser ? » Mon regard croise celui de ma grande soeur, parfaitement au courant que cette question revenait de vie ou de mort. Peut-être pas à ce point, mais il en revenait de mon rêve. Elle reste près de nous, enlève une mèche de mon visage. « J'en sais rien, Sarah. » Mes yeux deviennent humident et c'est dans des moments comme celui-ci que je réalise qu'il y a un an, j'avais foutu mon couple en l'air et que je n'avais pas simplement perdu la femme que j'aimais, mais celle qui me comprenait sans rien demander en retour, sans efforts.